Beko TSE 1230 - ANNEXE 547 User Manual Page 18

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Le « baromètre » de Reporters sans frontières
Les entraves à la liberté de la presse ont nettement augmenté en 2001
Le travail des journalistes est considéré par l’association Reporters sans frontières comme « difficile » dans quatre-vingt-dix pays,
et la situation comme « très grave » dans dix-huit autres pays. Plusieurs ONG s’inquiètent du durcissement des lois dans les démocraties
TOUS les indicateurs sont au
rouge. Les organisations non gou-
vernementales chargées de veiller
à l’exercice libre et indépendant de
l’information ont décidé, d’une
seule voix et sans concertation, de
donner l’alarme. Le bilan pour l’an-
née 2001, rendu public mercredi
2 janvier par l’association d’origi-
ne française Reporters sans fron-
tières (RSF), pointe un nombre
croissant d’entraves à la liberté de
la presse. Dans le monde, « le nom-
bre de journalistes interpellés, agres-
sés, menacés, le nombre de médias
censurés sont en forte hausse par
rapport à 2000 », constate-t-on au
sein de RSF.
Quelques semaines auparavant,
l’International Federation of Jour-
nalists (IFJ) appelait, fin octobre,
les professionnels de l’information
à réagir au vu des résultats alar-
mants de son enquête « Journa-
lisme, libertés publiques et guerre
contre le terrorisme », réalisée
après les attentats du 11 septem-
bre dans une vingtaine de pays.
Les menaces sur la liberté de la
presse, selon l’IFJ, ne proviennent
plus exclusivement des Etats dicta-
toriaux – même si la situation de la
presse y est d’une gravité sans
commune mesure –, mais aussi de
« gouvernements qui ont agi trop
vite dans l’élaboration des lois anti-
terroristes ».
Veillant, depuis 1949, au renfor-
cement de la démocratie et des
droits de l’homme, le Comité direc-
teur sur les moyens de communica-
tion de masse du Conseil de l’Euro-
pe s’est lui aussi formellement
inquiété des entraves à la liberté
de la presse, se déclarant, le
26 novembre 2001, être « profondé-
ment préoccupé par les assassinats
de journalistes (…) ainsi que par les
nombreuses formes de harcèlement
physiques et psychologiques dont ils
peuvent faire l’objet lorsqu’ils ren-
dent compte des situations de con-
flits et de tensions ». « Consterné »
par la mort des huit journalistes
tués en Afghanistan (Le Monde du
29 novembre), le Conseil a « exhor-
té tous les gouvernements à prendre
toutes les mesures qui s’imposent
pour empêcher ces violations » des
libertés fondamentales et à « pour-
suivre ceux qui les ont commises ».
Même si la très grande majorité
des 189 pays siégant aux Nations
unies reconnaît qu’une presse
libre est indispensable pour la
libre formation des opinions et
des idées, dans les faits le nombre
de journalistes interpellés (489,
selon RSF) a augmenté de 50 %
par rapport à l’an 2000. Celui des
journalistes agressés ou menacés
(716 cas avérés), de plus de 40 %.
En 2001, un nombre jamais atteint
de professionnels de l’information
a été mis en prison – 110 journalis-
tes sont actuellement derrière des
barreaux.
Le continent le plus meurtrier a
été l’Asie (14 journalistes tués). Au
Proche-Orient, dans les territoires
palestiniens, trois journalistes ont
été tués, selon l’International
Press Institute (IPI), basé à Vien-
ne, en Autriche, qui parle
d’« année de tous les dangers pour
la presse ». Sur le continent améri-
cain, dix journalistes et dix collabo-
rateurs de médias ont été tués,
dont un journaliste et huit techni-
ciens dans les attentats du World
Trade Center à New York. En
Colombie, trois journalistes, à nou-
veau, ont été assassinés. Flavio
Bedoya, de l’hebdomadaire Voz,a
été tué le 27 avril 2001 de quatre
balles, après avoir reçu des mena-
ces de mort pour avoir publié un
article sur des exactions commises
par les paramilitaires. Il y critiquait
aussi « l’incapacité de l’armée et de
la police à capturer les criminels ».
En Europe, un journaliste,
Martin O’Hagan, du Sunday
World, a été tué le 28 septembre à
Belfast, en Irlande du Nord, par un
groupe militaire loyaliste, pour la
première fois depuis le début des
années 1960. Un journaliste a éga-
lement été tué au Pays basque
espagnol. Par ailleurs, le gouverne-
ment Aznar renforce depuis le
11 septembre la pression sur cer-
tains correspondants étrangers
qui continuent de qualifier l’ETA
d’« organisation séparatiste bas-
que », alors qu’à Madrid on souhai-
terait la réduire à une simple « ban-
de de terroristes ». En Europe, tou-
jours, deux autres journalistes ont
été tués au Kosovo et en Ukraine.
Les attentats commis aux Etats-
Unis le 11 septembre, et la riposte
américaine, ont été particulière-
ment « néfastes pour la presse »,
selon Reporters sans frontières. Il
y eut d’abord les reporters de
guerre tombés en Afghanistan,
puis les nouvelles contraintes
liées à la « lutte antiterroriste »
imposées à la presse dans les
démocraties. Freimut Duve, le
représentant de la liberté de la
presse pour l’Organisation pour la
sécurité et la coopération en Euro-
pe (OSCE), a prévenu le Conseil
permanent de cette organisation
qu’il « [n’autoriserait] pas que la
lutte contre les criminels (ou le terro-
risme) réduise la liberté de la pres-
se » (Le Monde du 7 novembre
2001). « Il y a une grande dégrada-
tion de la situation dans nos pro-
pres démocraties, analyse Robert
Ménart, le secrétaire général de
RSF. Nous constatons des dérives
autoritaires en France, aux Etats-
Unis, au Canada en matière de pro-
tection des sources des journalistes
ou de nouvelles entraves à la circu-
lation de l’informaion sur Internet,
par exemple. »
L’IFJ constate « la difficulté pour
trouver un équilibre entre le désir de
l’Etat de poursuivre le crime et l’obli-
gation professionnelle du journa-
liste de protéger sa source ». Cette
fédération, qui épingle notam-
ment la France, mentionne l’in-
quiétude des professionnels face
aux nouvelles initiatives gouverne-
mentales destinées à lutter contre
le crime organisé alors que la légis-
lation française sur les photo-
reportages, notamment, est déjà
l’une des plus contraignantes du
monde occidental, selon l’IPI. Les
récentes mesures de lutte antiter-
roriste souffrent, selon le syndicat
des journalistes SNJ-CGT et l’asso-
ciation professionnelle Presse
liberté, d’une absence de débat et
de réflexion concertée.
Elles restent, toutefois, incompa-
rables avec les mesures repressi-
ves utilisées, par exemple, par le
Kazakhstan. Des troupes armées
du ministère de l’intérieur y ont
investi, en novembre 2001, le bâti-
ment de la chaîne de télévision pri-
vée KTK en interrompant tempo-
rairement ses émissions. « Les
autorités ont expliqué que dans le
cadre du conflit en Afghanistan tou-
tes les installations stratégiques de
la République doivent être sur-
veillées par le ministère de l’inté-
rieur », rapporte Reporters sans
frontières.
Florence Amalou
En Chine, des groupes mafieux s’attaquent aux journalistes
b 31 journalistes tués.
Huit reporters ont été tués
en Afghanistan alors qu’ils
couvraient le conflit armé.
b 489 journalistes interpellés.
Le nombre de journalistes
interpellés par les autorités
a augmenté de 50 % par rapport
à l’année précédente.
b 110 journalistes actuellement
emprisonnés. La Birmanie
et l’Iran sont les deux
plus grandes prisons du monde
pour les journalistes.
b 716 journalistes menacés ou
agressés. Au Bangladesh plus de
130 journalistes ont été agressés
par des militants politiques.
b 378 médias censurés.
En Turquie, une centaine
de médias ont été suspendus
par l’instance de régulation
audiovisuelle.
b 18 pays siégeant aux
Nations-unis connaissent
une situation « très grave ».
Dans les 171 autres Etats
représentés, la situation de
la presse est « correcte » dans
81 pays, « difficile » dans 90 pays.
Les médias afghans vont peut-être renaître de leurs cendres
PÉKIN
de notre correspondant
Déjà en butte à la censure politique du Parti, les
journalistes chinois sont de plus en plus exposés à des
agressions physiques de la part de bandes quasi
mafieuses cherchant à décourager certaines enquêtes
d’investigation. Dernier victime en date, Xu Yong,
journaliste au Guide la vie de Qingdao, port de la pro-
vince du Shandong, a été violemment passé à tabac, le
12 décembre 2001, devant son domicile. Selon l’agen-
ce Chine nouvelle, qui rapporte les faits, le journaliste
a été « gravement blessé au visage, aux yeux, aux jambes
et dans le dos ». Xu Yong s’était attiré de féroces inimi-
tiés pour avoir enquêté sur une multitude de trafics illi-
cites. Il lui arrivait d’infiltrer ces milieux interlopes en
maquillant son identité. Après son agression, Xu Yong
a solennellement appelé la justice à protéger le travail
des journalistes cherchant à « mettre en lumière les
puissances sinistres et les mafias ».
Cette affaire de Qingdao fait suite à d’autres agres-
sions autrement plus graves s’étant soldées par mort
d’homme. Le 15 août, Tian Wei, journaliste à la Radio
de Qiqihar (province du Heilongjiang), a été assassiné
à coups de couteau sous les yeux de sa femme. Selon
ses amis, les assassins sont liés à des intérêts économi-
ques mis en cause par des reportages de Tian Wei. Il
avait notamment dénoncé un restaurant ne respec-
tant pas les normes de pollution. La police n’a toute-
fois pas retenu la thèse de la représaille mafieuse pour
lui préférer celle d’un vol ayant mal tourné.
Dans ce genre d’affaire, l’attitude de la police locale
fait parfois problème. Dans des micro-climats sou-
vent délétères s’imbriquent appareils politico-
administratifs et intérêts mafieux, les journalistes fai-
sant preuve d’audace sont très exposés. Cela a valu
une fin tragique à Feng Zhaoxia, du journal Gejie Dao-
bao de Xi’an (province du Shaanxi). Feng Zhaoxia a
été égorgé le 15 janvier 2001 par des inconnus. Il
s’était illustré dans des enquêtes dévoilant la collusion
entre groupes mafieux et certaines autorités locales.
La police de Xi’an a hâtivement classé le dossier en se
retranchant derrière la thèse du suicide.
LA PRESSE INSTRUMENTALISÉE PAR LE POUVOIR
La protection des journalistes fait l’objet d’un débat
récurrent dans la presse chinoise. Depuis des années,
les rédactions en chef des journaux plaident pour
l’adoption d’une loi à l’Assemblée nationale du peu-
ple (ANP) protégeant les intérêts de la corporation.
Cette loi n’a jamais vu le jour, le Parti communiste
craignant qu’elle n’introduise une autonomie de la
presse dangereuse pour son statut de parti unique.
Ce même pouvoir central n’hésite pourtant pas à
instrumentaliser la presse pour dévoiler des scandales
étouffés par les institutions policières et judiciaires
locales, souvent elles-mêmes gangrenées par la cor-
ruption. Les reporters de Jiaodian Fangtan, célèbre
émission de la chaîne centrale de télévision CCTV,
sont ainsi dépêchés quasiment en service comman-
dé ! – dans les provinces pour enquêter sur des malver-
sations. Il leur arrive parfois d’être rossés par des gros
bras locaux. Pris en tenaille entre les encouragements
du pouvoir central et les intimidations des féodalités
locales, les journalistes le payent souvent très cher.
Frédéric Bobin
Le nombre
de professionnels
interpellés
aurait augmenté
de moitié
en un an
ENTRE IMPRIMERIES en rui-
nes et diffusions restreintes de pro-
grammes radio-télévisés, les
médias afghans ne répondent pas à
la forte attente de nouvelles de la
population. Les quelques journaux
officiels ne sont plus vendus dans
la rue mais sur abonnement unique-
ment, dit-on sur place. A ce jour,
les principales sources d’informa-
tion sont radiophoniques. La sta-
tion française Radio france interna-
tionale (RFI), l’américaine Voice of
America et la britannique BBC, qui
diffusent toutes trois dans les lan-
gues locales, seraient les plus écou-
tées. En attendant mieux.
En Afghanistan, la presse a tou-
jours été sous le contrôle du gou-
vernement, à l’exception d’une
courte période dans les années
1960 sous le règne de Zaher Chah.
On comptait une dizaine de titres
de presse avant l’arrivée au pou-
voir des talibans en 1996. Puis les
lecteurs afghans ont fini par se
détourner complètement de leurs
journaux, cantonnés au récit des
prêches de mollahs et des puni-
tions infligés aux récalcitrants. Le
principal journal, Anis (publié en
langue dari), qui tirait à
50 000 exemplaires, ne diffuse plus
qu’à 5 000 exemplaires. Il est l’un
de ceux à Kaboul qui ont survécu
au régime fondamentaliste avec
Hiwad (en pachtou) et le Kabul
Times (en anglais). Mais à Kaboul, il
n’y a plus de journalistes afghans.
Ils se sont exilés ou se sont recon-
vertis. « Nous n’avons pas d’appa-
reil photo, pas de dictaphone, les tali-
bans sont partis avec l’ordinateur,
les journalistes ne sont pas formés »,
explique Adjiruddin Ekbal, le direc-
teur de Hiwad, un écrivain juste
revenu du Pakistan.
Plusieurs projets financés par
des ONG ou des organisations
internationales sont actuellement
en préparation. Comme ce nou-
veau Centre des médias, soutenu à
hauteur de 12 000 dollars
(13 440 euros) par l’Unesco, élabo-
à Kaboul par trois jeunes journa-
listes français, qui souhaitent aider
matériellement des journalistes
afghans « indépendants » jusqu’ici
exilés dans la vallée du Panshir ou
au Tadjikistan.
LA TÉLÉVISION DE BERLUSCONI
Une équipe de journalistes âgés
de 28 à 35 ans, regroupée autour
de Faheem Dashti ancien corres-
pondant en Afghanistan de France
Télévision –, et de Leila Mastan,
actuellement en France, travaille
aussi à la relance du Kaboul Weekly,
en dari, en pachtou et en anglais (il
est soutenu par l’AINA, l’Unesco et
Reporters sans frontières). Ce jour-
nal de douze pages avait été lancé
le 16 février 1993 en pleine rivalité
armée entre différentes factions
moudjahidines. Malgré trois mises
sous scellés, en raison de ses criti-
ques, l’hebdomadaire avait perdu-
jusqu’au 3 septembre 1996, date
de la prise de Kaboul par les tali-
bans. L’hebdomadaire, qui pourrait
être diffusé dès la mi-février, pré-
voit de redémarrer avec une édi-
tion de huit pages en format
tabloïd, tirée à 2 500 exemplaires.
Au programme de la nouvelle mou-
ture : actualités du pays « sans prise
de parti et en toute indépendance
politique et culturelle », histoire,
échanges et compréhension autour
des différentes religions ayant
cours dans le pays, sports, revue de
presse internationale, dossiers con-
sacrés aux jeunes et à la reconstruc-
tion de l’Afhganistan ainsi qu’aux
femmes, une rubrique économie,
etc.
Parallèlement, de nombreuses
propositions venues d’Inde, d’Iran,
d’Italie, de Turquie, d’Allemagne,
de Chine, affluent pour faire renaî-
tre la télévision nationale afghane.
Même Silvio Berlusconi, le prési-
dent du Conseil italien et magnat
de l’audiovisuel actuellement con-
testé, a proposé au chef du gouver-
nement provisoire, Hamid Karzaï,
de fournir une station de télévision
complète. « J’ai eu des entretiens
avec un responsable italien mais je
ne suis pas très sûr d’avoir bien com-
pris ce qu’il m’a promis », admet
Abdul Aziz, le nouveau patron de
la télévision nationale afghane.
Contacté par l’Agence France
Presse au sujet de ces nouveaux
projets, le nouveau ministre
afghan de l’information affiche une
prudence suspecte : « Nous n’avons
aucun problème avec la liberté de la
presse. Nous sommes très respec-
tueux de la liberté d’expression, a-t-il
dit. Mais sous certaines régulations.
En particulier, nous ne voulons pas
d’ingérence étrangère, cause de tous
nos malheurs. » Le redémarrage
des médias locaux, souhaité tant
par la communauté internationale
que par la population locale, pour-
rait être plus compliqué que prévu.
Fl. A. (avec AFP)
COMMUNICATION
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LE MONDE / MARDI 8 JANVIER 2002
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